- ANTHOLOGIE DU PORTRAIT DE CHORISTE -
 Par déontologie, aucun nom n'est cité ci-dessous, mais chacun reconnaitra sa voisine ou son voisin.
 Le sans gène
Il a l’air de souffrir quand c’est un autre qui chante. C’est pour cela  qu’il  se bouche toujours une oreille. Bruyant il parle haut, interpelle  le chef.. Chaque chorale a son sans-gêne, et elle doit faire avec…Le  paresseux
 … c’est un homme doux, un rêveur qui s’est fourvoyé  dans une chorale et ne sait pas comment s’en sortir. Alors il reste. De  pareils choristes ne sont pas dangereux. Ils donnent au public  l’illusion du nombre.
 Le touriste
On le voit de temps à autre débarquer dans la salle de répétition. On ne  sait pas trop s’il fait vraiment partie de l’équipe. Il ignore  quasiment tout du répertoire mais cet authentique figurant sera présent  le jour du concert pour faire du play back et c’est lui qui s’inclinera  le plus bas, pour saluer….
 Le sportif… 
En répétition, campé sur ses pieds tel un haltérophile, il bombe bien le  torse pour prendre sa respiration, se met en apnées avant d’attaquer  les notes et devient tout rouge avant d’expulser le moindre son. Il  chante de la gorge, tout en force.. : plus c’est fort, mieux c’est….
 Le (rare) ténor
Heureuse la chorale qui possède des ténors. Qu’ils soient bons ou  mauvais, les ténors sont des êtres très chers. Quoi qu’il en soit,  devant la pénurie, baptise-t-on volontiers «ténor» un malheureux baryton  qui souffre le martyr dans les aigus, mais qui ne se plaint pas, fier  qu’il est d’être un objet précieux…
 Celui qui s’ennuie…
Consulte souvent sa montre. Il a toujours disséminé parmi ses  partitions, quelque article intéressant à reluquer, quelque revue ou à  défaut quelque chose à manger…. Il bouge beaucoup sur place ou  s’assoupit inopinément selon le cas. La plupart du temps il pense à  autre chose, il observe les murs de la salle et il souffle beaucoup. Si  c’est une dame, on peut la voir consulter ses messages sur son portable  ou, entre deux soupirs, se limer les ongles…
 Le donneur de conseil
A force de l’écouter on finit par faire les mêmes erreurs que lui. C’est  lui qui, généralement, offre généreusement son temps en faisant perdre  le leur aux autres.
 Le bavard
Il a mis au point une technique lui permettant de chanter et de parler  en même temps…
 Le distrait
Il est rarement à la bonne page… Son classeur est un fouillis  indescriptible : les chants sont rangés dans n’importe quel ordre, on y  trouve aussi bien la liste des commissions. Il rêve, oublie les départs  et doit rattraper les autres en cours de route.
 Le braillard
Il chante plus fort que tout le monde dès lors qu’il croit savoir sa  partie…. il n’a qu’un seul credo : fortissimo. Il est moins grave qu’une  épidémie, mais fait beaucoup plus de bruit…
 Celui qui a passé  l’âge
On l’a déjà éjecté de plusieurs chorales mais il insiste. Sa voix  chevrote, il manque d’air… Ayant perdu une partie de son acuité auditive  il avance au juger et improvise beaucoup.
 La complexée
Le plus difficile est pour elle est … de chanter ! Aussi a-t-elle une  toute petite voix. Elle n’attaque jamais franchement les notes, surtout  dans la nuance forte ; elle redoute les couacs… Celle-là peut chanter  faux à satiété sans que cela dérange quiconque. Avec son demi-décibel  elle est inaudible.
 Le consciencieux
Obsédé des annotations, celui-là note tout sur ses partitions. Il  souligne, surligne, multiplie les ajouts, les couleurs, fait des  renvois, des commentaires. Personne ne s’y retrouverait. Pas même lui.
 Celui qui a «de la  voix»
Pour obtenir une sonorité harmonieuse il est nécessaire d’homogénéiser  le timbre des pupitres. Les voix les plus timbrées se voient sommées de  rentrer dans le rang. Alors malheur à celui qui possède un bel organe.  Celui qui  a de la voix sera souvent prié… de se taire.
 Le sensible
Un moindre pianissimo l’émeut, il aime la musique et souvent elle le  bouleverse. Il a souvent la larme à l’œil.et au premier problème  relationnel, il en perd le sommeil et fond de cinq kilos. Il souffre en  silence mais la musique finit par le consoler de tous ses maux…
 Le râleur
Il n’est jamais content, n’aime pas le programme, trouve que l’on  apprend trop vite ou trop lentement, que le calendrier est trop chargé  ou trop maigre.. De toute façon la tenue de concert est ridicule et il  ne supporte pas la façon de travailler du chef…. Il se demande ce qu’il  fait là. Les autres se posent.. la même question…
 Celui qui rechigne à  chanter en étranger
Il veut bien chanter n’importe quoi, mais surtout pas en étranger. Il a  l’oreille musicale, mais pas la mémoire des sons. Sa prononciation est  laborieuse, et maladroite. Il bute sur chaque mot. C’est une souffrance  pour lui et pour ses voisins.
 L’enseignant
Il commet parfois l’exploit de maitriser les rudiments du solfège. De  plus il est souvent ouvert aux attentes du chef. C’est un élément fort  appréciable pour une chorale. Bien qu’ayant appris, à l’IUFM, à placer  efficacement son larynx afin d’éviter l’extinction, lorsqu’il chante,  l’enseignant a beaucoup de mal à retrouver les bonnes sensations.  Celui-là qui ne peut s’impliquer sensuellement, le fait…  pédagogiquement…
 L’informaticien
Il rentre toutes ses partitions dans le programme de son ordinateur et  les réécrit en plus gros. Car il travaille ses chants au bureau. Souvent  il arrive à la répétition avec une autre version d’une œuvre,  découverte par inadvertance sur internet. Il est alors tout fier  d’exhiber sa trouvaille.
Pour lui, la musique reste avant tout une discipline mathématique et le  solfège un code binaire. Il ne communique d’ailleurs avec les autres  choristes que par courrier électronique. Rien d’étonnant, alors, à ce  que, parfois au beau milieu d’un chant, il beugue !
  
 Et il y aurait encore le psychologue, le dragueur,  l’étudiant fauché, le naïf, l’étourdi, celui qui a de l’ambition…le  couple âgé, le juriste,
 Tiens le juriste 
Il ramène tout aux statuts de l’association et à la loi. Il intervient  lors des assemblées générales pour remettre les responsables sur les  rails dès lors que ces derniers s’en écarteraient un tantinet. Avec lui  on ne peut pas dévier. Il est la garantie morale et l’assurance  juridique de la chorale.
 Et enfin très rare :  le choriste normal
Celui-là n’affiche pas de tare particulière, il ne jalouse pas ses  congénères, est né équilibré, n’a  pas l’esprit tordu mais aime  simplement chanter.
Il n’a pas une voix extraordinaire, mais juste. Il possède quelques  notions  de solfège. Il a bon caractère, ne médit jamais. Il aime bien  tous styles : classique, romantique, même la variété. Celui-là ne se  fait pas remarquer, on l’oublierait presque, sinon aux concerts : car  c’est lui qui assure le mieux. C’est le choriste idéal, le préféré du  chef de choeur. Un cas … très rare
.….
Il y aurait encore l’inquiet, le cadre, l’agressif, le soliste et bien  d’autres mais n’oublions pas
 Le bon président
Un homme (ou une femme) qui connaît bien le fonctionnement de la chorale  pour l’avoir pratiquée pendant de nombreuses années, il est  expérimenté, compétent et respectable. Il a une bonne présentation. Les  chevelus en jogging avec percing à la narine ont peu de chance d’hériter  de la fonction. Il sait écouter ses interlocuteurs, entendre leurs  doléances, analyser les problèmes, définir les objectifs, planifier les  actions et en fin de compte mener à bien ses projets personnels en ne  tenant compte de l’avis de personne. Donc le président doit être entêté.  Cependant un obstacle subsiste, le chef de chœur !
Et c’est bien là le drame du président car il doit savoir humblement  s’effacer devant le maestro au moment de recueillir les fleurs du succès  car, malgré ses responsabilités, le président ne tient pas la baguette !  Cependant le président saura se rattraper et briller en particulier  quand il fera des discours. Mais que serait une chorale sans ce fameux …
 Chef de chœur
Le chef de chœur rayonne sur ses ouailles, se pavane parmi sa cour.  Caractériel, il s’enflamme volontiers au moindre couac, devient tout  rouge et pique des colère noires. Mais c’est pour le bien de la  collectivité. Capricieux, il change souvent d’avis.  Il est quelquefois  bizarre mais c’est un artiste.  Qu’il soit devenu chef par vocation, par  un concours de circonstances ou par le plus grand des hasards, qu’il  soit chanteur sur le déclin ou jeune prof de musique, qu’il soit  bénévole ou rémunéré, il est avant tout un être travailleur, un utopiste  ambitieux et surtout un homme extrêmement patient. Pour accomplir sa  tâche il doit avoir un moral très solide. Parmi ses nombreuses  responsabilités, nous citerons en vrac, le recrutement des choristes, le  choix du répertoire, l’élaboration d’une saison équilibrée,  l’organisation des répétitions, l’animation du groupe.  Il doit être un  bon communicateur. Bref un vrai chef de chœur est tout cela à la fois :  sélectionneur, entraineur, soigneur, éducateur, psychologue, psychiatre…  Et, en plus, il doit être MUSICIEN. Alors qu’on l’aime ou qu’on ne le  supporte pas, qu’il soit respectueux ou insultant, sympa ou mal  embouché, qu’il suggère la musique ou que l’on ne comprenne rien à sa  battue, le chef est le chef, il faut lui obéir : un point c’est tout !